Vous avez du mal à respirer, même en faisant peu d’effort ? Votre médecin vous a proposé des tests pulmonaires, et vous vous demandez ce que signifient ces chiffres sur votre feuille de résultats ? La spirométrie et la DLCO ne sont pas des examens compliqués à réaliser, mais leur interprétation peut être déroutante. Pourtant, ces deux tests sont parmi les outils les plus fiables pour comprendre ce qui se passe dans vos poumons - même quand tout semble normal à première vue.
Qu’est-ce que la spirométrie, et que mesure-t-elle ?
La spirométrie est le test de fonction pulmonaire le plus courant. Vous respirez profondément, puis vous expirez aussi fort et aussi longtemps que possible dans un tube relié à un appareil. Cet appareil enregistre deux valeurs clés : le volume expiratoire forcé en une seconde (FEV1) et la capacité vitale forcée (FVC). Le FEV1, c’est le volume d’air que vous arrivez à expulser dans la première seconde. Le FVC, c’est le volume total que vous expirez en une seule expiration maximale. Leur ratio, FEV1/FVC, est le plus important. Si ce ratio est inférieur à 0,7, vous avez une obstruction des voies aériennes. C’est le cas dans l’asthme, la BPCO ou la fibrose pulmonaire avancée avec air piégé. Mais attention : un FVC bas ne signifie pas toujours une restriction pulmonaire. Parfois, c’est juste que vous avez de l’air piégé dans vos poumons (dans la BPCO, par exemple), ce qu’on appelle une « restriction pseudo-restrictive ». C’est là que la DLCO entre en jeu.Qu’est-ce que la DLCO, et pourquoi est-elle si différente ?
La DLCO, ou capacité de diffusion du monoxyde de carbone, mesure une chose très précise : la capacité de vos poumons à transférer l’oxygène du sac aérien (l’alvéole) vers votre sang. Elle ne regarde pas le débit d’air, mais l’échange gazeux. Pour ce test, vous inhalez un mélange de gaz contenant une petite quantité de monoxyde de carbone (0,3 %), vous retenez votre respiration pendant exactement 10 secondes, puis vous expirez. L’appareil calcule combien de CO a été absorbé par votre sang. Ce chiffre est ensuite corrigé selon votre taux d’hémoglobine, votre âge, votre taille et votre sexe. La norme ? Entre 75 % et 140 % de la valeur prédite. En dessous de 75 %, c’est une réduction de la diffusion. Au-dessus de 140 %, c’est inhabituel, mais possible dans certaines conditions. Ce test est souvent ignoré, même par les médecins. Pourtant, il révèle des choses que la spirométrie ne voit pas. Par exemple, vous pouvez avoir une spirométrie normale et une DLCO basse. Cela peut signifier une maladie interstitielle débutante, une embolie pulmonaire chronique, ou une maladie du tissu conjonctif comme le lupus ou la sclérodermie.Comment les deux tests se complètent pour poser un diagnostic ?
Voici comment les résultats s’assemblent comme un puzzle :- Spirométrie normale + DLCO normale : vos poumons fonctionnent bien. Si vous avez encore de la dyspnée, il faut chercher ailleurs - cœur, anémie, obésité, ou même anxiété.
- FEV1/FVC < 0,7 + DLCO basse : c’est typique de la BPCO avec emphyseme, ou de la fibrose pulmonaire avancée. L’emphyseme détruit les alvéoles, donc la surface d’échange diminue.
- FEV1/FVC normal + FVC basse + DLCO basse : c’est une restriction vraie, souvent due à une maladie du parenchyme pulmonaire comme la fibrose interstitielle. Vos alvéoles sont raides et épaissies, donc l’oxygène ne passe plus bien.
- FEV1/FVC normal + FVC basse + DLCO normale : c’est une restriction extraparenchymale. Vos poumons sont bons, mais ils ne peuvent pas s’étendre. C’est le cas dans la scoliose sévère, l’obésité massive, ou un diaphragme paralysé.
- DLCO élevée (au-dessus de 140 %) : rare, mais possible dans l’asthme aigu, les shunts cardiaques gauche-droite, la polycythémie, ou une hémorragie pulmonaire. Dans l’asthme, les vaisseaux sont dilatés, donc plus de sang passe, ce qui augmente artificiellement la DLCO.
Le ratio FVC/DLCO est aussi un indicateur puissant. S’il dépasse 1,6, il y a 92 % de chances que vous ayez une hypertension pulmonaire. Ce n’est pas un diagnostic définitif, mais un signal d’alarme fort.
Quand la DLCO est-elle indispensable ?
Les directives américaines et européennes recommandent la DLCO dans plusieurs situations :- Quand vous avez une dyspnée inexpliquée, même si la spirométrie est normale.
- Avant une chirurgie du poumon (pour évaluer le risque post-opératoire).
- Quand on suspecte une maladie interstitielle - la DLCO chute souvent avant que la spirométrie ne montre des anomalies.
- Pour surveiller l’évolution de la fibrose pulmonaire. Une DLCO inférieure à 35 % est associée à un risque multiplié par 2,8 de décès dans les 5 ans.
La DLCO est souvent le premier signe d’alerte. Dans la fibrose pulmonaire, elle peut être à 60-70 % de la norme alors que le FVC est encore à 70 %. Cela donne un avantage de 12 à 18 mois pour commencer un traitement avant que les lésions ne deviennent irréversibles.
Les erreurs courantes d’interprétation
La DLCO est trompeuse si on ne la regarde pas dans son contexte. Voici les pièges les plus fréquents :- Anémie : chaque gramme d’hémoglobine en moins réduit la DLCO d’environ 1 %. Si vous êtes anémique, votre DLCO sera faussement basse.
- Tabagisme : le monoxyde de carbone du tabac se lie à l’hémoglobine, ce qui fausse le test. Il faut arrêter de fumer au moins 24 heures avant.
- Ne pas mesurer l’hémoglobine : 8 à 12 % des tests sont mal interprétés parce que l’hémoglobine n’a pas été prise en compte.
- Ne pas retenir sa respiration 10 secondes : si vous expirez trop vite, la DLCO sera sous-estimée. Les personnes âgées ou très fatiguées ont souvent du mal à tenir ce temps.
La plupart des erreurs viennent de l’oubli de ces facteurs. Un bon médecin vérifie toujours l’hémoglobine, la date du dernier tabac, et la qualité de l’expiration.
Que faire après les résultats ?
Si votre spirométrie est normale mais que vous avez des symptômes, ne vous contentez pas d’un « tout va bien ». Demandez la DLCO. Si elle est basse, un scanner thoracique haute résolution est souvent la prochaine étape. Si elle est élevée, il faut éliminer un shunt cardiaque ou une polycythémie. Si vous avez une maladie chronique comme la BPCO ou la fibrose, la DLCO doit être suivie régulièrement - pas seulement la spirométrie. Elle est plus sensible aux changements de l’état des alvéoles. Dans les essais cliniques pour de nouveaux traitements de la fibrose, la DLCO est devenue une mesure principale. C’est elle qui montre si un médicament ralentit la progression de la maladie - pas le FVC.Conclusion : pourquoi ces tests sont indispensables
La spirométrie vous dit si vous avez de l’air qui passe bien. La DLCO vous dit si l’oxygène passe bien dans votre sang. Beaucoup de maladies pulmonaires commencent silencieusement. Un patient peut respirer normalement en repos, mais avoir une DLCO déjà réduite. Sans ce test, on passe à côté de la maladie pendant des années. Ce n’est pas un examen de routine, mais il devrait l’être pour toute personne avec une dyspnée inexpliquée, un antécédent de tabagisme, ou une maladie auto-immune. Il est peu coûteux, non invasif, et d’une précision rare en pneumologie. Ne laissez pas un résultat de spirométrie « normal » vous rassurer à tort. La vraie santé pulmonaire, c’est l’échange gazeux - et c’est là que la DLCO parle.La spirométrie et la DLCO sont-elles douloureuses ?
Non, aucun des deux tests n’est douloureux. La spirométrie demande juste de souffler fort dans un tuyau. La DLCO demande de retenir sa respiration 10 secondes. Il n’y a pas d’aiguille, pas d’injection. Certains peuvent se sentir étourdis après la DLCO, mais c’est rare et passe vite.
Faut-il se préparer avant les tests ?
Oui. Arrêtez de fumer au moins 24 heures avant. Évitez les repas lourds 2 heures avant. Ne faites pas d’effort intense la veille. Pour la DLCO, on vous demandera sans doute votre taux d’hémoglobine - apportez-le si vous l’avez récemment fait. Certains centres vous demandent d’arrêter les bronchodilatateurs 6 à 12 heures avant, selon le protocole.
Pourquoi la DLCO est-elle plus précise que la spirométrie pour détecter l’emphyseme ?
Parce que l’emphyseme détruit les alvéoles, les petites poches d’air où l’oxygène entre dans le sang. La spirométrie ne voit que l’air qui s’échappe. La DLCO mesure directement la capacité de transfert de l’oxygène. Dans les premiers stades, la spirométrie peut être normale, mais la DLCO chute déjà. C’est pourquoi elle est le premier signe d’alerte.
Un résultat de DLCO bas signifie-t-il forcément une maladie grave ?
Pas forcément. Une DLCO basse peut venir de l’anémie, du tabagisme, ou même d’une mauvaise technique. Mais si elle est basse et que vous avez des symptômes, c’est un signal à ne pas ignorer. Un médecin doit toujours l’interpréter avec votre historique médical, vos examens complémentaires et votre état général.
La DLCO peut-elle être normalisée avec un traitement ?
Oui, dans certains cas. Si la cause est l’asthme mal contrôlé, un bon traitement peut améliorer la DLCO. Si c’est une embolie pulmonaire, un traitement anticoagulant peut stabiliser ou même améliorer la valeur. Mais dans la fibrose pulmonaire ou l’emphyseme, la DLCO ne revient pas à la normale - le but est de ralentir sa chute. C’est pourquoi son suivi est si important.

Commentaires (1)
James Harris
décembre 9, 2025 AT 06:38La DLCO, c’est le seul test qui te dit si ton oxygène arrive vraiment à tes cellules. La spirométrie, c’est juste du vent.